Par MARIE-PIERRE BELIZAIRE, fille
du RWA KAF et musicienne :
Quel type de personne était votre papa ?
Un bon vivant, une personne simple.
De quel instrument jouait-il le plus souvent ?
De tous mais il avait un faible
pour son bob. A ses heuresperdues, il jouait aussi de l'accordéon
(ndlr comme Granmoun Lélé), de la flûte aussi. Pour
le maloya, il savait fabriquer ses instruments (dans
le film Maloya Dousman, on le voit raconter comment, sans professeur,
il cassa une dizaine de bobres avant d'en réussir un qui resiste.
ndlr)
Pourquoi le Rwa Kaf ?
Papa, c'était le roi déjà
depuis qu'il était enfant , car il était le seul garçon.
Et kaf, c'est parce qu'un jour il était sur un colonaze (terre d'un
gros blanc) qui lui a dit mais pourquoi on t'appelle le roi ? T'es pas roi,
toi ! T'es le roi des cafres, voilà ce que tu es ! Et c'est ainsi
que qu'on l'appelle Rwa Kaf
Donc rien à voir avec la politique ?
Non, pas du tout ; c'était pas son truc. Il
allait voter mais sans plus.
Et Madagascar ?
Mon arrière grand-mère
était malgache une antandroy (peuple du sud). En 84, je crois, il
fit un voyage là-bas et joua avec des musiciens malagasy. Même
s'il ne parlait pas malgache, il connaissait quelques chansons appartenant
à la tradition qu'il avait apprises marmay. Le style de Papa, c'était
des chansons qui ressemblaient à des ti-romans sur la vie de tous
les jours, des devinettes. C'était un bon vivant, je vous ai dit…
Vous êtes du même coin que Granmoun
LéLé qui s'inspire aussi d'influences malgaches, vous
vous fréquentiez ?
Pas vraiment, on se croisait
et on se saluait sur les podiums mais c'est tout. D'ailleurs, Granmoun avec
sa femme, est venu et est resté à la veillée de Papa.
Son fils, Willy est venu à l'église.
Votre famille va t-elle continuer comme le lui a
demandé Firmin Viry lors des obsèques ?
Tout à fait . D'ici un an
on devrait être présent pour des spectacles. On va continuer
le groupe avec l'association qu'on a montée. Cette année,
il y aura un hommage spécial à Papa lors du 20 décembre,
Lafèt'kaf' (date de l'abolition de l'esclavage à la Réunion).
Propos recueillis par Stéphane Delphin ©
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Par PAUL MAZAKA, responsable culturel au
Conseil Général puis à la mairie de St-Denis
" Lo Rwa Kaf fait partie des
trois artistes qui ont laissé leur empreinte sur le Maloya : Viry,
Lélé et lui. D'ailleurs, c'est lui le premier qui s'est exporté
hors de La Réunion. Le Rwa Kaf, c'est aussi le premier, peut-être
même avant Lélé à avoir amené des pans
de la culture malgache dans le Maloya. Ce n'était pas un militant
comme Firmin Viry. mais il apporté cette reconnaissance à
la culture malgache ici à la Réunion. Peut-être n'a
t-il pas eu le rayonnement en terme de disques ou de concerts comme Lélé
qui lui, a sûrement été emporté par l'enthousiasme
et la jeunesse de sa famille ( ndlr : Willy Philéas) mais c'est un
tout grand "
Concerts mémorables
" On était
en 84 et un grand festival nommé Château-Moranges, un quartier
de Saint-Denis, avait permis de voir Gérose sur une grande scène
et ce fut réellement un grand moment à La Réunion. Christian
Mousset était là et il décida d'inviter Lo Rwa Kaf. Ce
concert s'est passé dans une petite salle, le mazouin ,
quelque chose comme ça. Ils ont commencé à jouer lui,
avec Danyel Waro aux chœurs, Etienne Bob et tout d'un coup le public
qui était en dehors de la salle est descendu et là, ce fut magique.
Ils étaient emballés. C'était la première fois
que le Maloya rencontrait un tel succès hors de ses bases. En 85, c'était
le concert du Stade de l'Est où pour la première fois, un groupe
africain [Touré Kunda] se produisait à La Réunion. Ce
fut encore un grand moment dans la "carrière" du Rwa
Kaf et le cœur des réunionnais. Plus tard, en 92, Lo Rwa Kaf passe
à l'Olympia. L'idée était de créer un événement
pour la communauté de métropole. En 94, Granmoun Lélé
se produisait au Zenith "
Propos recueillis par Stéphane Delphin
©
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CHRISTIAN
MOUSSET, organisateur du Festival Musiques Métisses
à Angoulême
«J’étais
à La Réunion en 84 pour le festival de Château-Morange
(voir plus haut). J’ai vu ce soir-là Tifok , Lo Rwa Kaf et Etienne
Bob. Vu la qualité de leur spectacle, j’ai pensé a eux
pour l’édition d’Angoulême la même année.
Du Rwa Kaf, j’ai le souvenir de quelqu’un de simple , discret,
ne se mettant pas en avant : Par exemple, c’était Danyel Waro
qui était censé faire le chœur et en fait, c’est
lui qui avait assuré la plus grande partie du spectacle. Il était
visiblement heureux de laisser la scène aux jeunes. A ses côtés,
il y avait Etienne Bob qui excellait au Bob. C’est dire la formationde
très haute qualité. A l’époque, faire la promotion
du Maloya n’allait pas de soi. ..Je me souviens m’être rendu
à la Drac pour leur annoncer mon projet ; et de voir leur surprise
lorsque je leur annonçais que mon but était d’inviter
des artistes de musique traditionnelle.A ce moment-là, le Maloya n’en
était qu’au début de sa reconnaissance y compris sur place»
Propos recueillis par Stéphane Delphin
©
Liens vers d’autres articles
(Pôle régional des musiques actuelles
)
(journal Témoignages)